L’émigration des pauvres au Haut-Canada dans les années 1830 était directement liée aux conditions socio-économiques en Grande-Bretagne, servant de soupape de sûreté pour «l’excédent démographique» de ce pays. Les autorités coloniales faisaient appel à des émigrants de toutes sortes dans le double but d’appuyer les intérêts du Haut-Canada et de venir en aide à la mère patrie. On a fortement sous-estimé le nombre d’émigrants sans ressources qui, de leur propre gré ou non, sont alors venus dans les Canadas. On n’a aussi que partiellement évalué l’accueil qu’ils ont reçu, les problèmes d’adaptation qu’ils ont eus, de même que l’influence qu’ils ont exercée sur la répartition des terres et les formes d’assistance publique. Nous essayons ici de reconnaître les effectifs de ces miséreux, leur origine et les conditions de leur venue; nous établissons aussi pourquoi les structures de la société ont perpétué une indigence qui, à l’origine, n’était liée qu’au type et au nombre même de ces émigrants. Nous concluons que les autorités d’alors ont délibérément sous-évalué l’ampleur des difficultés que connaissaient les nouveaux arrivants au point de déformer la réalité, cette présentation des choses devant néanmoins être reprise par les historiens.
